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Spécial bécasse: à lire par les amoureux de l'oiseau !

Actualité publiée le 11/08/2016

Imperium Bellus - Spécial bécasse: à lire par les amoureux de l'oiseau !

Interview du Club National des Bécassiers Par Bernard JEAMBRUN

Pierre AVELLAN, Président du POINTER CLUB FRANCAIS nous parle du Pointer...




B.J- Mon cher président, je vous remercie de répondre à cette interview alors que la saison des Fields est lancée et que votre temps est compté. Je vais vous poser des questions que se pose le Bécassier de terrain non spécialiste des Fields-Trials.


Les revues cynégétiques ont longtemps présenté le Pointer comme le chien de grande plaine. Où se situe le Pointer pour un Bécassier ?


PA- Ce n’est pas uniquement le fait des grandes revues spécialisées, le Pointer est le roi de l’Espace, c’est un des fondamentaux de la race, sa création pour chasser les grouses moors par nos amis Britanniques sur des étendues immenses et des oiseaux difficiles lui donne ses lettres de noblesse. La plaine lui est facile, parce qu’il est doté de moyens hors normes et les perdrix grises en compagnies sont les oiseaux de chasse les plus difficiles. Tout d’abord par l’effet de groupe de la compagnie et parce que la Grise est un oiseau farouche, sa survie dans un espace dénudé, face aux prédateurs lui a forgé un caractère des plus méfiants. Seuls les grands chiens sont capables de donner satisfaction dans cette chasse s’ils sont suffisamment ambitieux et autoritaires pour terrasser les compagnies. Face aux grises, il faut un arrêt utile, exploitable pour le tir, on ne peut se contenter d’une pose d’arrêt dans l’émanation ou sur la voie des oiseaux. Même situation pour le rouge qui est une piéteuse de talent, en Espagne pays où la chasse de perdrix brava est inscrite au patrimoine culturel, le Pointer est l’auxiliaire le plus utilisé. Partons donc d’un dicton simple, « qui peut le plus peut le moins ». Avec la Bécasse le principe est le même, que cherche un bécassier de nos jours , un chien courageux , résistant à l’effort , battant beaucoup de terrain , s’enfonçant profond au bois et dépourvu de sensibilité sur l’émanation pour éviter une multitude d’arrêts à vide , une autorité sur les oiseaux. Ce profil est celui du Pointer. On me reproche souvent que le Pointer ne rentre pas facilement au bois à cause de son poils ras, à ce propos je réponds que si ce chien refuse l’ouvrage il n’est pas un Pointer, poils ras...poils longs, ce n’est pas l’armure qui fait le Chevalier c’est son courage.




B.J- Chasser avec un Pointer est un plaisir, mais en quoi se différence-t-il des autres races ?


PA- Être un Pointer, c’est avant tout savoir conjuguer la force et l’élégance : Il est l’expression même du chien de chasse créé pour les sportsmen et il l’affiche dans sa construction qui approche l’idéal. Sachez que là où d’autres races vont attirer l’indifférence, le Pointer déchaînera les passions et les critiques les plus virulentes seront toujours celles de l’ignorant. Chasser la Bécasse dans un bois sombre sous un ciel gris avec un Pointer c’est un peu comme amener la lumière. Le rythme de la cloche est soutenu et cette musique est particulière à cette race. Le Pointer est un athlète, un sportif, il bat le bois avec facilité, sûr de ces moyens, il devient propriétaire de l’espace et cette situation donne une image de confort au chasseur. Le plus intéressant chez le Pointer qui chasse cet oiseau avec expérience, c’est la lecture du terrain, il fait des impasses sur certains secteurs où on ne trouve jamais d’oiseaux, ce n’est pas une méthode exclusive à cette race, mais j’ai remarqué que le Pointer est coutumier de cette exploitation rationnelle du bois, un sixième sens …. Concernant son efficacité, ce qu’il faut comprendre c’est que le rendement du Pointer est l'aboutissement mental et physique d’un standard de travail des plus aboutis, dans ce standard tout est écrit avec étude, précision et mesure pour obtenir le maximum de l’efficacité cynégétique. Vient ensuite que nombre de races ont bien essayé d’agrémenter le travail par une connotation d’esthétisme, rarement l’ouvrage fut réussi avec l’harmonie audacieuse qui se dégage du Style Pointer, d’un outil redoutable il est devenu œuvre d’art. Cette race est destinée à ceux qui recherchent le rendement avec panache, de nos jours on chasse pour le sport et le plaisir, le Pointer est un fournisseur d’émotion !

         


B.J- Bien des chasseurs qui se contentent d'un dressage minimum, voire pas du tout de dressage peuvent-ils utiliser un Pointer?


PA- C’est même une évidence à mes yeux, Le Pointer est né pour chasser vite, pour ce faire il est doté d’un nez puissant, d’un arrêt très ferme et d’une méthode de quête naturelle. En anglais « to point » signifie « arrêter ». Cette grande facilité à arrêter est une particularité de la race. Ces qualités le rendent agréable à dresser, sans grande difficulté. Grâce à sa mémoire fabuleuse, le Pointer s’élève et s’éduque facilement, il est reconnu par les professionnels comme le chien d’arrêt le plus facile à dresser à condition que l’on fasse preuve d’un minimum de doigté. Il n’oublie jamais une leçon apprise. Ce que je demande à mes Pointers pour la Bécasse, c’est un contact régulier, ils peuvent… prendre beaucoup…beaucoup de terrain, mais ne doivent jamais s’installer seuls dans le bois sans revenir au contact avec leur conducteur, vient ensuite un arrêt très ferme sur l’oiseau et un rappel parfait. J’attache une très grande importance au rappel, c’est la base pour un Pointer que l’on destine au bois. À ce stade, je considère que le plus gros du dressage est fait, le reste c’est pour les puristes. j’utilise les très jeunes en couple d’abord avec un chien confirmé puis dès qu’ils s’émancipent ils retournent en solo pour apprendre le métier , plus tard, matures ils retourneront en couple , le couple est un passage difficile avec des chiens vivant dans le même chenil , mais l’intelligence du pointer et sa facilité à “comprendre” le besoin du patron , qui d’ailleurs est souvent naturel sont d’une aide précieuse. À noter que c’est un chien doux et sensible, très discret au chenil, de nos jours avec les problèmes de voisinage c’est un atout supplémentaire. C’est un compagnon facile et agréable à la maison, affectueux et gentil avec les enfants. Mais soyons réaliste, le Pointer est tout sauf un citadin.

 


B.J- Les bécassiers dans leurs comptes rendus trouvent les bécasses de plus en plus furtives. Le Pointer peut-il faire la différence sur ces oiseaux ?


PA- la Bécasse est un des derniers gibiers sauvages abordables par tous les chasseurs, la pression de chasse exercée sur cet oiseau dans ces dernières décennies a forcément impacté son comportement, d’abord par des prélèvements sur des familles d’oiseaux les plus faciles qui ne reproduiront plus et tendent donc à disparaître. La chasse a donc forgé une sélection en augmentant l’instinct de survie de cette espèce. Ce constat que nombre de bécassiers partage a rendu la Bécasse fuyarde et rusée, de plus en plus distante au contact de l’homme et du chien. Cette situation n’est pas réjouissante pour l’avenir de cette chasse car elle est à mon avis la résultante d’une pression trop forte… Sauf peut-être pour l’utilisation du Pointer qui est un viandard, avec une grande facilité olfactive qui lui est reconnue, il est capable de percevoir les émanations les plus légères , dépourvu d’une sensibilité inutile, installé avec certitude dans l’émanation il remonte les oiseaux avec autorité pour les bloquer, là où d’autres ne feront que des approches incessantes sans jamais rien montrer (ce comportement n’est finalement qu’un manque d’autorité) Alors le Pointer peut-il faire la différence ? Regardons plus loin, il est peut-être tout simplement l’archétype du chien Bécassier de demain.




B.J- Quel doit-être le comportement d'un Pointer sur une bécasse piéteuse ? Le comportement prudent de certains chiens n'incite-il pas la bécasse à piéter ?


PA- Les Chasseurs qui ont observé le comportement des oiseaux face à un danger me comprendront. Un oiseau qui sent le danger d’un prédateur se retrouve face à deux solutions, la fuite ou le mimétisme qu’il choisit en se rasant. Plus le prédateur sera prudent et cherchera une approche dissimulée, plus l’oiseau sera enclin à mettre de la distance et choisira une fuite avec une distance de sécurité importante, surtout que lorsque il se sent poursuivi même à distance, il obtient la certitude qu’il est devenu la proie. Quand un chien arrive à vive allure sur un gibier, celui-ci n’est jamais certain qu’il est visé par le prédateur et souvent …très souvent ça marche et la bécasse choisit de ne pas bouger sachant qu’il lui reste toujours la solution de l’envol. Le comportement d’un pointer est inscrit dans ses gênes, c’est un dominateur, il est violent , brutal, il cherche donc à prendre le dessus sur l’oiseau en l’obligeant à se raser , en prenant des risques…celui de faire voler surtout quand il est jeune et qu’il manque d’expérience…mais quand il a compris la manière et la distance ,il devient très meurtrier même sur les oiseaux les plus roublards.




B.J- Le bécassier qui aime son chien lui pardonne beaucoup mais il n'empêche que les fautes gâchent le plaisir. Quelles sont les fautes que vous constatez sur le terrain en tant que juge de travail sur le Pointer ?


PA- c’est un sujet délicat, car certains fautes en Field ne sont pas particulières plus à une race qu’à une autre, mais plus à un individu qu’à un autre, il n’y a donc pas de généralité, il ne m’appartient pas d’en faire état. Je choisis donc un problème plus général qui frappe toutes les races, le manque de contact avec le chasseur. L’amélioration des races a donné plus de moyens à nos chiens, plus rapides, battant plus de terrains mais ces moyens doivent être canalisés. Le beeper a déjà fait couler beaucoup d’encre, pendant longtemps j’ai été un farouche défenseur de cet instrument autant à la chasse qu’en Field, par expérience et observation j’ai totalement changé d’avis. Je crois que le beeper pourrait être un outil intéressant en Field, mais la dérive serait rapide en validant des points d’un chien en sortie de main qui se laisserait arrêter par une bécasse, finalement il vaut mieux sans. Je pense sincèrement que le Beeper en utilisation trop précoce sur un jeune chien abîme ce jeune sujet. Le beeper est un artifice qui compense le manque de dressage, rend utilisables les chiens qui n’ont aucun contact. On équipe un chien d’un beeper, il s’en va où il veut et on attend sans plus aucune écoute ni attention soutenue à la cloche, il suffit d’attendre que celui-ci se mette à téléphoner, ces chiens confortés dans cette méthode ne sont plus utilisables sans le Beeper. je reviens vers votre question , en Field le beeper est interdit, ce que je remarque le plus souvent ( sauf pour les trialisants avertis) c’est le manque de concentration et d’écoute des conducteurs sur la cloche , c’est donc plus une faute des conducteurs que des chiens, ils ne savent pas où se trouve leurs chiens , ils ont tellement pris l’habitude d’attendre le beep , qu’ils sont perdus , alors que moi-même après plus de quarante permis et des milliers de cartouches qui m’ont rendu à moitié sourd , j’entends nettement l’arrêt net et précis de la cloche qui signifie un contact avec l’oiseau et j’arrive à localiser le chien mieux que son conducteur…..Je vais faire rire certains lecteurs , mais les bécassiers me comprendront , quand on chasse toute une journée en portant une attention soutenue à la cloche….le soir on l’entend encore en s’endormant !




B.J- Bien des races ont été améliorées avec du sang de Pointer, mais le Pointer ne peut progresser que par une sélection interne à la race. Quelles sont les orientations du Pointer Club pour l'amélioration de la race ?


PA- le Creuset de notre sélection se trouve dans les épreuves de Grande Quête , les sujets qui s’illustrent dans cette discipline , sont des Pointers hors normes capables de battre un maximum de terrain, d’être très rapides et donc d’avoir un nez exceptionnel pour percevoir l’émanation dans une quête qui est menée au galop. Un Pointer n’est d’ailleurs jamais trop rapide, si son nez le lui permet, il peut chasser avec un galop soutenu qui effraie beaucoup de chasseurs. Vient ensuite que le dressage pour la grande quête est le plus poussé qui soit, il faut donc un Pointer capable de s’y soumettre et donc de faire preuve d’une intelligence supérieure, capable aussi de s’installer dans l’espace sans se perdre et de rester toujours au contact de son conducteur même à une très grande distance. Bien entendu, je ne parle pas de ces galopeurs idiots qui parcourent la plaine sans chasser, ils ne sont pas des Pointers et ne méritent pas la reconnaissance de la race. La grande quête est une discipline qui ne tolère aucune sensibilité, et pour cause, croyez-vous qu’un chien sensible peut avoir un avenir dans un parcours d’un quart d’heure sachant que le plus souvent les points sont pris à des distances extrêmes, le chien même le plus styliste est immédiatement sanctionné dès qu’il fait preuve de sensibilité. Les chiens de grande quête, ne produisent pas forcement ou très peu des chiens de grande quête ce serait trop facile, mais ils transmettent à leurs descendances les qualités majeures de la race, le style, l’intelligence et les qualités olfactives. Vous me dites que bien des races ont été améliorées par le sang Pointer, ce n’est un secret pour personne et pour donner une réponse probante, laissez-moi vous raconter une anecdote : Je venais de devenir juge de travail et nous étions dans une épreuve ouverte où nombre de races sont présentes , le soir au repas je me trouvais donc en compagnie de juges venant d’autres races avec bien évidemment beaucoup de continentaux , les juges venant du Pointer éveillent toujours un peu la méfiance et quelquefois même une pointe de jalousie . Je fus alors un peu bizuté par ces juges d’expérience, qui bien évidemment m’emmenèrent sur les propos récurrents autour de la race , un chien trop rapide, de grand nez certes, mais qui prend trop de terrain..., la curée battait son plein et je me défendais comme un beau diable juste emmené par la passion pour cette race. A mes côtés se trouvait un homme sympathique et plein d’esprit président d’une race bien différente du Pointer le « Bleu d’Auvergne », d’un naturel jovial il ne disait mot et souriait à toutes ces joutes verbales. L’ arène était en train de se vider et j’avais accusé avec courage toutes les banderilles , essayant de clôturer ce débat en exposant à mes collègues des continentaux qu’il leur fallait se coucher tôt puisqu’ils devaient marcher plus que nous pour couvrir le même terrain … Cela fît rire ce sympathique président et il me rétorqua , vous vous êtes bien défendu mais vous auriez pu conclure par une estocade fatale ,vous avez simplement oublié de leur faire savoir que toutes leurs races quand elles s’affaiblissent dangereusement se tournent inévitablement vers le Pointer pour repartir … Je vais donc vous donner une recommandation , soyez rigide avec votre race …tous les autres en ont besoin, surtout ceux qui se couchent les premiers…Je n’ai jamais oublié ce conseil.




B.J- Vous vous adressez à un Bécassier qui est tenté par un Pointer. Quel cheminement lui conseillez-vous pour qu'il puisse se procurer le chien de ses rêves ?


PA- Ma réponse se doit d’être faite avec un maximum d’objectivité, cette race quand elle est dans l’excellence de la chasse est imbattable et peu de chien obtienne un tel rendement. Quand le Pointer chasse avec les qualités naturelles que nous lui connaissons, son propriétaire est un bécassier comblé, il ne changera plus jamais de race. Mais quand il n’est pas un Pointer, présentant un manque de qualité de chasse, d’équilibre, manquant d’intelligence, n’arrêtant pas, n’obéissant pas, alors il est le pire des maux ! Car ses excès mettent encore plus en avant ses défauts, pour faire simple quand ce chien n’a que l’apparence d’un Pointer sans sa qualité de chasseur, il devient une calamité. Si je dépeins un tableau aussi noir, c’est pour mettre en garde l’acquéreur sur le manque de sérieux dans son acquisition, acheter, former un jeune chien demande un investissement financier et une période dans le temps précieuse pour le chasseur, évitons donc d’acheter un cancre qui va être votre compagnon pendant une décennie. Un nombre important de portées sont mises en lignes sur les petites annonces internet. Beaucoup sont des assemblages LOF ou non LOF de proximité qui n’engagent que leurs producteurs ne visant qu’un seul but, vendre des chiots et ce sans une réelle recherche de l’excellence. Soyez donc très méfiants et n’hésitez pas à demander des garanties. Méfiez-vous des « origines bécassières », elles n’existent pas, car les meilleurs pointers sur bécasses sont la plupart du temps issus de reproducteurs classés dans les épreuves de printemps. Soyez regardant sur la précocité, un Pointer arrête dès son plus jeune âge. L’équilibre et l’intelligence des géniteurs sont les piliers qui doivent vous guider. Rapprochez-vous du Club pour obtenir un maximum d’informations, celui-ci a d’ailleurs mis récemment en publication une rubrique « puppies » pour les jeunes pointers de moins d’un an. In fine : prenez des renseignements auprès de personnes compétentes et ne vous laissez pas séduire par les annonces internet !




B.J. Mon cher Président, je vous remercie d'avoir bien voulu vous prêter à ce jeu de questions-réponses et je vous propose de vous exprimer librement sur un sujet de votre choix.


PA- Un regret d’abord, que la Cynophilie (à travers ses concours de travail) et la Chasse soit si éloignées, comme deux mondes qui cohabitent en s’ignorant, alors que nous aurions tant à gagner à nous rapprocher pour l’Avenir. Un point de détail ensuite, sachez avant tout que je n’écris pas sur les qualités du Pointer dans l’espoir qu’il nous les montre ou pour faire simplement du prosélytisme sur cette race , mais plus simplement parce que ce chien m’a prouvé au quotidien en plus de 40 saisons de chasse qu’il est capable d’ être le meilleur. Je pense en avoir beaucoup dit sur cette race, mes derniers mots seront des remerciements à un Président départemental du CNB 30, Bernard Galibert qui nous a toujours aidés à faire vivre nos épreuves sur Bécasse en Languedoc pendant plus de 15 ans dans une région où la Chasse est forte mais où la cynophilie peine à prendre place.

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